VOLCANS ET GÉANTS DES CIMES (épisode 1) – jour 1 à 5
Présentation du voyage
Après être parti seul dans le sud-ouest américain au printemps 2015, j’ai eu la chance de retourner aux Etats-Unis environ deux mois plus tard, fin juin et début juillet. Mais cette fois, nous étions bien deux. Ce voyage était prévu depuis plusieurs mois et m’a demandé pas mal de préparation. En effet, au départ, il était question de partir trois semaines, plutôt du côté de l’Utah. Mais pour diverses raisons, notre durée de séjour a dû être raccourcie à deux grosses semaines. Après réflexion, notre choix s’est porté sur le nord de la Californie que je ne connaissais pas encore (et qui est largement délaissé par les touristes étrangers), avec une petite incursion dans le sud de l’Oregon. La préparation du voyage a donc nécessité plus de recherches que d’habitude, notamment au niveau des hébergements. Nous ne savions pas si la région serait très fréquentée à cette période de l’année et quel serait donc le taux de remplissage des motels. Nous aurions pu faire un peu de camping, mais cela demandait du matériel supplémentaire à emporter et, à vrai dire, nous voulions un peu plus de confort…
Lundi 22 juin, la mise en jambe
3 h 08 du matin, heure locale. Pas moyen de se réveiller plus tard, ce mardi 23 juin, premier jour de notre voyage estival aux États-Unis, Californie. On est trop décalé. On n’a pas intégré le décalage horaire de 9 h et la fatigue se fait sentir.
On a toutefois vécu un vol paisible la veille, le 22 juin donc, bien que long. Arrivés à l’aéroport de Los Angeles, on n’attend pas tant que ça à la douane. Température de 23° Celsius annoncée. On a soif. J’achète à prix d’or (2,49 $) cinquante centilitres d’eau qu’on apprécie gorgée par gorgée. Le chauffeur noir et natté de la navette nous menant à l’agence de location de voiture Avis, joyeux, et bien réveillé, lui, joue les guides touristiques sur fond musical. Un peu trop pour nous. Heu, non, on ne tient pas à prendre de photos… Oui, même des lettres géantes LAX. Sans façon, merci !
À l’agence Avis, on n’attend presque pas. Personnel efficace. Pas de Ford Escape comme demandé, mais peut-être mieux : une Chevrolet Equinoxe 4 x 4, rouge métallisée. Maintenant, il faut quitter Los Angeles. Je prends le volant. Pour sortir de la ville tentaculaire, il faut emprunter des kilomètres de périphérique. C’est long. Ralentissements répétés sur la douze-voies. Je m’en sors plutôt bien pendant que Christelle fait un petit somme. Il fait chaud. On a trois heures et demie de route jusqu’à Tulare et notre Motel 6. Il est un peu plus de 20 h lorsqu’on arrive. Chambre basique neuve, mais pas de frigo. Aïe. Pas de wifi gratuit. Re-aïe. Tant pis.
On fait finalement nos premières courses (alimentaire, du film plastique pour emballer les futurs sandwiches, de quoi se composer des salades, de l’essuie-tout…) dans deux supermarchés. Tiens, ils n’ont toujours pas remplacé les sacs plastique par des sacs cabas renouvelables, aux caisses. Les hôtes ou hôtesses de caisse placent directement nos achats dans les sacs ou c’est un(e) collègue qui s’en occupe. Le client s’y colle aussi, mais moins souvent. Il y a quelques caisses automatiques, mais pas partout. On trouvera également, à l’entrée de certaines grandes surfaces, du liquide hydroalcoolique ou des lingettes pour s’assainir les mains. Pas la peine d’évaluer ses courses avant de passer à la caisse : les taxes sont rajoutées et apparaissent sur la note finale. Les étals de fruits et légumes sont généralement très bien achalandés. Il y a toujours extrêmement peu de lait pasteurisé (on en achètera par petites bouteilles de 50 centilitres), mais toujours une quantité imposante de junk food (notamment des céréales et des boissons très sucrées) qui côtoient parfois, dans le même magasin, un rayon pharmacie.
Donc, après notre premier ravitaillement, on dîne sur le pouce au Burger King vers 21 h 30, une demi-heure avant la fermeture, à cinq minutes à pied de notre chambre.
On est explosé. Au dodo, vite. Pour la douche, on verra le lendemain. Bon, on n’a dormi que quatre heures…
Mardi 23 juin, tout en grandeur
Donc, ce mardi matin, on se réveille à 3 h 08… On prend le temps de se préparer pour une bonne journée. Petit-déjeuner puis préparation de nos salades composées pour le repas du midi.
On part à 6 h après avoir fait le plein de glaçons à la ice machine du motel pour notre petite glacière. On quitte Tulare, direction le parc national de Yosemite (Californie). Beaucoup de camions sur la six-voies. Mais la circulation reste relativement fluide. Les paysages défilent : des vergers, de la vigne, des collines et des plaines au jaune pastel fluo que nous aimons tant contempler (comme lors de nos vacances de l’été 2014, lorsque c’était l’hiver en Afrique du Sud)…
On arrive vers 8 h à la guérite d’entrée du parc de Yosemite. On commence par une balade au milieu des séquoias géants, à Mariposa Grove.
Gigantesques, majestueux, millénaires. Parfois brûlés sur le dessus de l’écorce mais toujours vivants. Parfois déracinés mais encore magnifiques et imposants. Parfois jumeaux, triplés. Parfois monstrueux avec des branches en portemanteau… Ils font près de 80-90 m de haut. Ce ne sont pas les plus grands, mais les plus gros. La circonférence de leur tronc, dont l’écorce les protège du feu, peut atteindre 10, 20 mètres ou davantage. Les contreforts au pied du tronc assurent leur assise.
Ce sont des géants des cimes aux troncs de parfois 4 à 6 m de diamètre, voire plus. Des piverts toquent sur leur écorce, très épaisse et fibreuse, couleur rougeâtre. Des oiseaux au bec très fin courbé comme une serpe mangent les insectes sur le tronc. Des écureuils et des chipmunks (pas de traduction française pour ces petits Tic et Tac) furètent sur les basses branches. Des moustiques rôdent. Il y a plein de visiteurs autour, évidemment. Des groupes avec des rangers. Des touristes en famille, comme ce papa et sa fille cadette venant de Chicago (Illinois). On reste bien deux heures à cheminer parmi les séquoias. On prend ensuite la route direction Glacier Point. On s’arrête d’abord à Washburn Point, avec la vue du Half Dome (dont on avait fait l’ascension en 2009) et de deux cascades, Nevada Falls et Vernal Falls.
On se rend à Glacier point. Des centaines de visiteurs ont eu la même idée… On continue nos photos du Half Dome et des monts et chutes d’eau alentour avant de déjeuner à l’ombre des rochers et des pins. Vues vertigineuses. Falaises découpées. Le Half Dome toujours aussi impressionnant avec son dos rond et sa falaise grise à pic. Majestueux et… définitivement orphelin de sa moitié.
On roule ensuite vers Tunnel View, point de vue à l’entrée de la vallée, pour avoir d’autres vues du Half Dome, d’El Capitan (la plus grande falaise du parc) et de la vallée elle-même. On s’arrête à Bridaveil Falls, mais on ne s’approche pas trop car la chute est trop ténue : le vent soulève un petit « voile de mariée » qui écume dans l’air, au sommet de la chute. On se rend à Lower Yosemite Falls, partiellement protégée par une cascade rocheuse que les visiteurs prennent plaisir à escalader à leurs risques et périls. On voit bien Upper Yosemite Falls, plus haut.
On passe devant Curry village et à Yosemite village, on reconnaît les lodges en bois situés à la lisière de la forêt et où nous avions dormi en 2009. On passe devant des grandes étendues aux herbes hautes, le long de la rivière plus ou moins asséchée… Jusqu’ici, on n’a pas vu de grands animaux. Normal, en ce milieu d’après-midi peuplé de touristes américains, asiatiques, français…
Comme Christelle est bien fatiguée, moi un peu aussi (je n’ai dormi que quatre heures en deux jours) et qu’on peut dès à présent prendre les clés de notre chambre, on sort de Yosemite vers 16 h 40 pour rejoindre le site hôtelier de Yosemite View Lodge.
Là, surprises. Bonnes et mauvaise. La mauvaise, c’est que là aussi, le wifi est payant (9,99 $ la journée !). Les bonnes : une grande chambre en duplex avec deux lits dont un grand queen bed (1,80 m), une mini-cuisine équipée, une grande salle de bain avec baignoire, au moins trois piscines (mais on est trop fatigué pour avoir envie d’en profiter), une vue sur la montagne, deux restaurants… Un escalier rose en colimaçon mène à la deuxième chambre de notre duplex. C’est normalement la chambre la plus chère de notre séjour : 176 €, tout de même (celles dans le parc sont encore plus chères). Je m’assoupis sur notre grand lit. Pendant ce temps, Christelle prépare nos sandwiches et nos salades composées pour le lendemain midi.
Après un petit apéro, on teste le restaurant du complexe hôtelier : pièce de bœuf (New York steak) et frites pour moi, riz jasmin à la noix de coco et légumes sautés dans une sauce caramélisée aigre douce pour Christelle. Avec, en plus, une soupe et une salade à composer (dans le salad bar, dans la pièce d’à côté). On a droit à de petites tranches de vrai pain pour démarrer. C’est bon. 44 $ la note. Plus le pourboire. Ici, comme ailleurs aux États-Unis, il est (fortement) suggéré, en toutes lettres sur la note, de donner en plus 10 % de la somme due (la conversion en dollars est écrite), voire 15 % (et le pourboire est même intégré derechef dans la note finale pour les groupes de huit personnes, voire moins). Cette pratique nous a toujours un peu mis mal à l’aise. Christelle trouve que c’est beaucoup à rajouter à la note finale et n’aime pas trop qu’on lui force la main. Mais on joue tout de même le jeu, plus ou moins…
Bien fatigués, on se couche vers 21 h 30. On a mis le réveil à 6 h. On va avoir besoin de forces. D’autant qu’on a appris à la télé ce soir qu’il va faire très chaud dans les jours à venir : plus de 100 ° Fahrenheit, soit plus de 38° Celsius en moyenne. Ça promet…
Mercredi 24 juin, deception trail and weird little casino town
Réveil à 6 h. On l’a entendu. On a bien dormi dans notre grand lit et sous notre plafond cathédrale. Petit-déjeuner de pain de mie grillé (on a un grille-pain) et beurre pour bien commencer la journée. Dehors, il fait encore bon. On se prépare pour une petite randonnée de deux heures environ à Yosemite : Artist Point ou Inspiration Point Trail, pour avoir une autre vue de la vallée de Yosemite. On va voir, selon la qualité du balisage. À ce niveau, on est un peu déçu ! Pas de balisage. En voyant la lumière du soleil à contre-jour sur le paysage, je comprends tout de suite que je ne pourrai pas immortaliser ce que je veux, mais la petite randonnée nous tente bien quand même. Le sentier, qu’on démarre vers 7 h 45, nous semble pourtant prometteur. Mais on doit assez vite chercher notre chemin en grimpant sur les roches de granit, entre les arbustes secs aux branches entremêlées, les buissons et les arbres. En fait, je me rendrai compte après la balade qu’on a raté le bon embranchement juste après le départ… On n’est sans doute pas vraiment bien réveillé !
On est un peu chargé. Les sacs à dos et matériel photo, volumineux, ne nous facilitent pas la tâche. On se dit que le sentier n’a peut-être pas été utilisé depuis longtemps… Finalement, on grimpe et on descend pendant une heure et demie quand même, « inventant » plus ou moins notre chemin…
Entre-temps, la température a grimpé (elle a d’ailleurs atteint les 100 ° Fahrenheit en soirée). Et les sacs à dos, ça tient chaud ! Mais il fait encore bon. Ce matin est idéal pour se promener. On fait un arrêt prolongé devant l’impressionnante falaise El Capitan, environ 1000 m de haut, paradis des grimpeurs. On est sur un pont surplombant la rivière Merced avec de beaux dégradés de vert d’eau dans la lumière. On reprend la route qui grimpe jusqu’à la Tioga. On s’arrête à Olmsted Point, un immense point de vue circulaire, une sorte de cirque de milliards de tonnes de granit, avec une autre vue sur le Half Dome, ses falaises et pics alentour. On marche quelques centaines de mètres sur les plaques de granit érodées, parsemées de buissons, d’arbustes et de petites fleurs roses en forme de corolles. Le soleil cogne, mais la brise atténue son effet. Le temps est comme suspendu. On est bien, assis dans ce paysage grandiose. On aurait même pu déjeuner dans des coins d’ombre… s’il n’avait pas été trop tôt.
Après cette pause, on se rend à Tenaya Lake. Idéal pour déjeuner, justement ! Ce qu’on fait, sur des roches plates, à quelques centimètres de l’eau. Autour de nous, une montagne de granit parsemée de sapins (on se demande comment ils poussent sur la roche ! Ils se nourrissent de ses minéraux ?), la forêt et des prairies, une eau bleu vert, calme, deux dames sur des stand up paddles (debout sur une planche, une rame), des dames à bord de canoës, quelques familles, des rangers qui pique-niquent… Et nous qui pique-niquons aussi et prenons des photos. Atmosphère calme. Le temps, là encore, s’arrête. Et il n’y a même pas de moustiques (j’ai déjà une dizaine de piqûres) ! Ça fait du bien. On repart du lac, requinqué. On fait un tour à Tuolumne Meadows. On se balade un peu dans les prairies avant de quitter le parc de Yosemite.
Au tour de Christelle de conduire un peu notre flamboyante voiture. Il est 14 h environ. En route vers Reno, dans le Nevada. À travers la montagne et la campagne, les villages. Sur de belles routes. Tiens, le prix du carburant décroît au fur et à mesure que nous avançons. Bonne nouvelle. La température, par contre, ne cesse de grimper. On dégouline en continu. À une heure de Reno, petit ravitaillement en alimentation (dont du beef jerky teriyaki, que Christelle adore !) et en essence. On arrive à Reno un peu avant 18 h. C’est une petite ville du Nevada aux allures de mini Las Vegas, avec ses hôtels casinos, mais en plus vieillot. On loge au Siena Hotel. J’ai réservé sur Internet une belle chambre en promo (76 $), avec vue sur la rivière et un king bed (deux mètres de large).
Las ! Il nous faudra trois allers-retours à la registration pour s’apercevoir qu’une des clés fonctionne mal, que la chambre proposée n’est pas celle réservée, que la bonne n’est en fait plus disponible et qu’on va nous en attribuer une autre… Là, à nouveau bonnes et mauvaise surprises : du wifi gratuit, un salon indépendant avec frigo et télé, une grande salle de bain, deux toilettes dont un indépendant avec lavabo, un grand lit king size, mais pas de vue du tout (en fait, vue sur des murs)… À part la « non vue », plutôt cool, cette suite ! Après plusieurs allers-retours entre la chambre et la voiture, on se commande du poulet teriyaki (servi avec riz et petits légumes) au resto asiatique de l’hôtel. J’en profite pour jouer 5 minutes au casino mais je sens que la chance n’est pas avec moi et je laisse rapidement tomber après n’avoir perdu que 5 $.
On dîne dans la chambre, sur la table basse, devant la télé, à l’ombre et au frais. Déjà 21 h 30. Bon sang ! Que ça passe vite. Un gros coup de barre se fait sentir. On sort une petite heure dans la ville pour prendre des photos en pause longue, avec le trépied. J’ai déjà repéré des rues et des enseignes lumineuses de casinos. Et surtout une arche lumineuse où on peut lire « Reno, the biggest little city in the world ». Ah, modestes, ces Américains ! Notre vision est peut-être déformée par le prisme de la fatigue, mais dans les rues, c’est glauque et vieillot. On voit peu de passants. Et certains ont des allures bizarres, désarticulées. Des ados se rejoignent. On se croirait parmi des personnages et les décors d’une série télévisée américaine, dans une cité fantôme (comme dans Les mystères de l’Ouest) avec des gens qui vont se transformer en zombies… Le vent rafraîchit un peu l’atmosphère. Il pourrait annoncer une tempête. Les enseignes sont kitsches, comme si la ville avait raté le coche de la modernité et était restée dans les années 80 (genre L’homme qui tombe à pic, encore une référence télé !).
On rentre à l’hôtel. Mais j’ai comme un gros doute sur l’arche qui ne ressemblait pas tout à fait à celle que j’avais vue sur internet en préparant le voyage. En fait, je n’ai tout simplement pas photographié la bonne ! J’y retourne, seul cette fois. Christelle est trop fatiguée. Poisseuse, aussi, dit-elle. Je trouve finalement mon arche, située dans la rue principale totalement morne, où quelques rares passants rentrent et sortent des casinos.
Sur le trottoir, un homme joue de la guitare et chante de la country. Sa voix résonne entre les bâtiments de la rue quasiment vide. Atmosphère très étrange… Il est tard, je rentre pour de bon à l’hôtel pour une nuit de sommeil bien méritée.
Jeudi 25 juin, soufre et volcan
Je me lève à 5 h 40. Petite nuit mais pas possible de dormir davantage… Le lit est pourtant super-confortable, mais il y avait trop de bruit ambiant de machinerie. Pas grave. Une bonne douche, un petit-déjeuner, une descente de bagages, un check out, et nous voilà partis vers 8 h pour trois heures de route. Direction le parc national de Lassen Volcanic, en Californie. Je conduis. Beaucoup d’autoroute, un peu de circulation, des paysages de plaines et de montagnes. En approchant de Lassen, on entre peu à peu dans une forêt de pins et de sapins, caractéristique du parc qui porte le nom du volcan qu’il abrite.
À 11 h 30, on commence par une balade de deux heures (aller, contemplation, retour) autour de Bumpass Hell : un mini Yellowstone avec ses concrétions calcaires, ses fumerolles, ses bassins d’eau fumante pleine de minéraux, ses bains de boue bouillonnante… Le tout dans les tons pastel gris, jaune, orange, crème… C’est beau. Avec une odeur caractéristique de soufre (ou œuf pourri) pas dérangeante toutefois. Pour admirer ces vapeurs issues des entrailles de la Terre, il faut grimper un peu, cheminer entre les pins et une végétation peu gourmande en eau. Le long du parcours, aller et retour, on rencontre pas mal de visiteurs (un peu trop à mon goût d’ailleurs !), dont beaucoup de familles avec de jeunes enfants. Je suis comme d’habitude plutôt chargé en matériel photo, mais Christelle m’aide un peu. Il fait chaud. Le soleil cogne.
On reprend la route pour déjeuner dans une clairière, sur une aire de pique-nique, à Kings Creek. Une table sous les pins, un air relativement frais, pas de moustiques (!). On fait une pause très agréable de trois quarts d’heure. On veut randonner sur Kings Falls Trail, mais le chemin est fermé pour cause de rénovation. Pareil pour Summit Lake. Zut. Je suis un peu furax. On passe très vite à Devastated Area (on n’a pas compris ce qu’il y avait à voir à part beaucoup de gros cailloux !) avant de continuer et de finir la route menant à la sortie nord du parc. Là, on cherche un peu avant de trouver le trail autour de Manzanita Lake… On ne regrette pas : 1,5 miles parmi les pins, les aiguilles et les pommes de pin, et surtout le long de la rive du lac bleu vert, des herbes hautes et des canards, avec de belles vues sur le volcan Lassen, en partie enneigé. Une promenade très agréable, presque bucolique. Certains visiteurs se baignent parmi… les canards. D’autres se prélassent à l’ombre ou au soleil. D’autres encore font du canoë sur le lac.
On fait le tour du lac en une heure environ, avant de prendre la route principale du parc en sens inverse. On s’arrête à trois points de vue : près de Kings Falls Trail pour photographier une prairie verdoyante (belles nuances de vert), au lac Helen donnant sur la montagne, au Emerald Lake (lac Émeraude, qui porte bien son nom).
Notre motel, le Mineral Lodge, se trouve à la sortie sud du parc, au bord de la route. On y arrive à 18 h à peine. Un magasin registration, un restaurant saloon chaleureux, une enfilade de chambres dans un bâtiment en bois pas très frais mais dont la terrasse couverte au bois peint en jaune (avec fauteuils et petite table devant chaque chambre) jouxte une prairie, un magasin de souvenirs dont le soubassement de la toiture est truffé de nids d’hirondelles… La chambre est un peu vieillotte, avec ses murs en bois et ses meubles en contreplaqué. Mais propre et fonctionnelle. Pas de climatisation mais un ventilateur à pales au-dessus de notre lit queen très confortable, des toilettes, un lavabo et une douche séparés, deux fauteuils clubs sur roulettes, une petite table carrée, un petit frigo… Le tout a un certain charme. On s’installe et on décide de zapper l’apéro pour dîner directement au restaurant (dans un décor de western, avec chaises à bascule sur la terrasse de la devanture) qui ne sert que jusqu’à 20 h.
La terrasse du restaurant nous plaît bien. Musique country pas trop forte, parasol. Les deux serveuses/gérantes sont vraiment adorables ; la cuisine et l’ambiance, familiales. Christelle commande une today’s soup cup (soupe aux légumes, en fait des légumes en morceaux dans un bouillon) et une assiette de spaghettis avec tomates pelées et champignons maison et garlic bread (super-bon, ce pain au beurre aillé !). Moi, une délicieuse truite avec frites et cole slaw. L’assiette de Christelle est remplie à ras bord et les quantités, astronomiques : il y a près de trois parts en une ! Bienvenue en Amérique ! Devant son étonnement, la serveuse sourit et résume, tout sourire : « American size ! ». Christelle en mange un tiers et je l’aide un peu. Mais on en laisse. On n’aime pas ça car on met un point d’honneur à finir nos assiettes. Mais pas possible de prendre une box, comme nous le propose une des serveuses : on randonne le lendemain et on n’aura pas de quoi réchauffer. Et les pâtes froides, ce n’est pas vraiment notre truc.
Vendredi 26 juin, lave en pente
On entend le réveil du téléphone à 6 h. On a bien dormi. Bonne douche. Bon petit-déjeuner. On est prêt à partir vers 7 h 30. On retourne au parc national du volcan Lassen. Une heure de route du Sud au Nord, puis on sort du parc pour atteindre son entrée située à l’Est, et le départ de notre randonnée Cinder Cone, pour atteindre le volcan du même nom. On se stationne près d’une aire de pique-nique et d’une base nautique. On prend de l’eau, des barres de céréales, les appareils photos et les chapeaux.
9 h 28. C’est parti pour environ trois heures de randonnée. Il fait déjà chaud. Heureusement qu’on part quand même le matin, et non pas l’après-midi comme initialement envisagé : nous allons avoir (un) peu d’ombre. Au départ, il y a peu de dénivelé mais que des faux plats. On marchera de bout en bout dans le sable caillouteux de la pierre de lave. Ça muscle, c’est plaisant pour les articulations, mais fatigant ! On traverse ainsi une forêt de pins pour atteindre le volcan. Les arbres nous offrent un peu d’ombre. Des chipmunks gambadent. Au bout d’une demi-heure, le volcan se profile. Minéral. Caillouteux. Avec quelques rares arbres sur son flanc.
Un large sentier tracé sur son cône permet d’atteindre son sommet. Le dénivelé est assez impressionnant. Avec une pente d’environ 40 %. C’est raide ! Et encore, moins que le retour, que l’on fera sur un chemin encore plus pentu… Il faut grimper tout ça, les pieds s’enfonçant dans du sable à gros cailloux, sous le soleil qui commence à cogner fort. Une bonne rasade d’eau, et c’est parti, lentement mais sûrement. Deux pas en avant, un pas en arrière. Le sac à dos et le matériel photo, lourds, n’aident pas vraiment. Les jambes se tétanisent, on sue à grosses gouttes. Vingt à vingt-cinq minutes plus tard, on atteint le sommet. Pas si long que ça mais épuisant. Ça en valait la peine !
D’autres sentiers serpentent en cercles au sommet du volcan éteint (au moins bien endormi). Notre fatigue est vite oubliée. Panorama à 360 degrés. Vue imprenable et silencieuse. C’est à couper le souffle. On voit le volcan Lassen, un immense champ de roches de lave noire pétrifiée (on en est passé tout près dans la forêt), des dunes colorées jaune orange rouge (Painted Dunes) avec des sapins verts, des lacs, d’autres montagnes du parc… Des petites fleurs d’un jaune fluorescent poussent sur le sable gris-noir de lave, autour et près du cratère. On reste plus d’une heure à cheminer, contempler et photographier le paysage.
Je propose donc ensuite de prendre un autre sentier pour redescendre : d’en haut, on voit qu’il faut passer par les dunes colorées et récupérer sans le rallonger, le chemin du retour. Christelle est moyennement motivée. On tente toutefois cette tangente. La descente est rude, avec une pente très prononcée, caillouteuse et glissante. Tellement qu’elle peut être dangereuse si on ne prend pas garde. C’est comme faire du ski dans du gros sable. Pas évident de rester stable ! On tombe d’ailleurs en arrière à plusieurs reprises. Heureusement que les sacs à dos nous protègent. Pas de gros bobos mais des courbatures. Quand on regarde ensuite en arrière, c’est assez… vertigineux. Arrivé en bas, on veut prendre le chemin du retour, mais il n’est pas… accessible. Alors on doit faire tout le tour du volcan après être passés à proximité des dunes colorées. Ça aurait été si le soleil ne cognait pas si fort, si on avait de l’ombre et s’il ne fallait pas tout le temps avancer dans le sable. Mais là, Christelle fatigue, et cette demi-heure supplémentaire de marche lui pèse. Heureusement qu’on a suffisamment d’eau. Marcher dans le sable sous le soleil et la chaleur, c’est un peu comme dans le désert. Fatigant.
On arrive au point de départ à 13 h. Un point d’eau où se laver les mains au savon, une table de pique-nique à l’ombre de grands conifères, un bon repas, des chipmunks curieux attirés par notre déjeuner… Tout ça nous a revigorés. On prend notre temps avant de partir pour la ville de Burney, toujours en Californie. Soit une petite heure de route. On arrive à notre motel vers 15 h : le Green Gables Motel. Bonne pioche ! Notre chambre est joliment meublée (lit king size, tables de nuit, bureau, meuble de télé) en bois clair, avec une climatisation neuve, un coin cuisine avec frigo, un four micro-ondes, lavabo et même une éponge imprégnée de produit nettoyant (!), une salle de bain blanche avec un meuble en bois peint et une baignoire… Bref. C’est presque… charmant. En plus, le petit-déjeuner est included dans le prix (97 $ quand même). Comme on est arrivé tôt, on prend le temps de faire une tournée de linge à la laverie du motel cousin et adjacent et on se ravitaille au Safeway voisin. À la caisse, le jeune caissier nous entend parler français. Ravi, il nous demande d’où nous sommes et nous dit quelques mots qu’il a appris à l’université. Comme d’autres Américains que nous croiserons, lui aussi a étudié le français à la high school. C’est fou comme ils sont ravis d’échanger avec nous quelques mots dans notre langue ! Rien que « bonjour, comment t’appelles-tu ? Merci, au revoir », ils adorent. Et surtout quand on leur répond en français.
On roule ensuite 10 mn jusqu’au McArthur Burney Falls Memorial, un parc d’État (8 $ l’entrée) où on peut randonner, camper, voir des animaux autochtones comme l’ours brun ou le puma (mountain lion, extrêmement rare toutefois)… Notre objectif : découvrir les Burney Falls et les prendre en photos. Ce sont de magnifiques chutes d’eau derrière lesquelles nichent de nombreux black swifts (martinet sombre). On y accède par un cheminement piétonnier. On y arrive vers 17 h et on y est reste plus d’une heure et demie.
C’est superbe et hypnotisant. Très vert autour des chutes, avec des arbustes et des conifères sur lesquels se posent des geais bleus. On peut même faire un trail autour. L’eau fracassée gronde. Le bruit est à la fois sourd et assourdissant. On peut descendre sur des roches dans la « piscine » d’eau bleu vert des chutes, en faisant attention à ne pas glisser. Beaucoup de visiteurs, campeurs, s’y rendent en maillots de bain : au fur et à mesure qu’on approche, les embruns mouillent de la tête au pied. Certains se baignent, en restant au bord. D’autres pêchent. La plupart des gens (beaucoup d’Hindous et d’Américains en vacances) se prennent en photos.
Il fait très bon, voire frais. Il pourrait y avoir au moins quinze degrés Celsius de différence entre la localisation de la chute et quelques dizaines de mètres plus haut. On prend des photos. Moi, au trépied, Christelle, en contrebas. À notre grand regret, la lumière ne donne pas sur les chutes (ce sera le cas seulement le matin, entre 6 h 30 et 8 h, suppose une ranger à qui je pose la question avant de quitter le parc). Des chiens de prairie viennent fureter parmi nous. En tout cas, on s’amuse bien. On prend la pose et notre temps.
C’est sans doute bizarre, mais en revenant, on est content de manger au McDo qui jouxte notre motel. Il faut dire qu’on a tellement faim. Et c’est… bon. De temps en temps. Surtout après la rando de ce matin. Extinction des feux à 22 h 15. On ne met pas longtemps à s’endormir dans notre grand lit de deux mètres de large…
A suivre dans l’épisode 2 de Volcans et géants des cimes : les tunnels de lave de Lava Beds et le lac bleu indigo de Crater Lake !
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